2005 MZ 1000S
24/7/2004
Par Neale Bayly
MZ 1000S : Premier essai en exclusivité
Ce n'était pas la recontre idéale. Sûr, je n'avais
pas été ébloui par son regard, et pour parler
franc j'ai failli m'éclipser devant certaines de ses
manières. Mais en relisant mon vieux manuel "les hommes et les
femmes sont autant faits pour se comprendre que des martiens et des
américains", je me suis calmé et j'ai positivé
pour notre rendez-vous suivant. On s'est retrouvés près
de chez moi, un endroit super où un de mes amis, qui sait y
faire, a arrangé les choses ; et à partir de là
notre relation s'est épanouie. Un week-end en Virginie et
quelques sorties en soirée le long du Blue Ridge Parkway ont
suffi à dissiper les incertitudes de nos premiers rapports,
comme se dissipent les brumes sur les montagnes de ma Caroline du Nord.
Même elle, voulait bien, à présent.
Bien sûr, toutes les bonnes choses ont une fin, en l'occurrence
un appel de John Stoddard, de chez MZ, qui me demande "t'as
bientôt fini avec ma p.... de moto ?" a mis brutalement fin
à cette idylle. Quelques semaines auparavant, John avait
déposé devant chez moi, aux aurores, une MZ 1000S
flambant neuve, avec un petit mot disant qu'il reviendrait la chercher
d'ici quelques semaines. Voila qui me laissait le temps d'emmener la
moto sur circuit, et faire un paquet de kilomètres sur route,
avant de me mettre au clavier.
Comme je l'ai déjà signalé, ça n'a pas
été le coup de foudre. Je m'attendais à une moto
plus compacte, et pour être honnête je trouvais son look un
peu démodé. Le contraire m'eût
étonné, compte-tenu de la vitesse d'évolution des
motos ces temps-ci, sachant que trois ans s'étaient
écoulés depuis que le projet avait été
dévoilé. Ensuite, lors de mes premiers tours de roues,
elle semblait vibrer excessivement aux vitesses usuelles, et donnait
l'impression d'être articulée en son milieu. Un coup de
fil à monsieur Stoddard pour récupérer des
pièces, et un aller-retour chez mon pote Jeff Sutton de
Precision Cycle, ont tout réglé. Transfiguré
même, devrais-je dire.
La suspension arrière avait été durcie au point de
n'avoir plus aucun débattement, alors que l'avant était
elle beaucoup trop souple. Le pignon de sortie de boîte avait une
dent de trop, sans doute pour passer les normes d'homologation, et la
pression des pneus était à peu près aussi bien
réglée que le fait ma femme sur sa voiture. Jeff m'a
gentiment monté un pignon plus petit, puis m'a fait monter sur
la moto pour retoucher la suspension ajustable en tous sens. Ensuite il
a réglé la pression des pneus, l'alignement de roue
arrière, et quelques autres bricoles avant de me renvoyer faire
un essai. ( Vous voyez, je me suis un peu retrouvé dans la peau
d'un pilote d'usine, en essais pour MotorCycleUSA !)
J'écarte d'un geste l'hôtesse avec son parasol sur la
ligne de départ, et j'attaque la route. Trois vitesses
passées plus loin, toutes mes idées noires étaient
chassées, j'avais un grand sourire rayonnant au travers du
casque !
Enroulant en sixième, j'ai passé quelques-uns de mes
virages préférés, à des vitesses à
trois chiffres en miles, soit plus de 160km/h. La MZ est restée
collée à ma trajectoire, après que je l'aie mise
sur l'angle avec une impulsion initiale minime. En coupant puis
remettant les gaz, elle s'est avérée pousser nettement
plus correctement à bas régime, et même le passage
des rapports semblait se faire plus en douceur. Désormais, en
ouvrant en grand la moto pousse immédiatement et efficacement,
ce qui n'était pas le cas avec le pignon plus grand, qui me
poussait constamment à passer un rapport plus bas que ce qui me
semblait normal. De retour à Precision Cycle, j'ai transmis mes
impressions à Jeff, on a un peu raffermi les suspensions en
prévision d'un prochain week-end sur piste au Circuit
International de Virginie, et j'ai pris le chemin du retour.
Une fois sur le circuit pour ce week-end de Sportbike, lorsque j'ai
déchargé la MZ, je n'ai pas tardé à
être assailli de questions. Entouré de pilotes et amateurs
de piste, il n'est pas étonnant que beaucoup connaissaient la
marque, puisque la MZ Scorpion bataille sur les circuits US depuis
quelques années maintenant. Avec son 660cm3 mono
d'origine
Yamaha, c'est une bonne moto de courses amateurs.
La MZ 1000S est une moto entièrement nouvelle, avec son twin
parallèle de 998cm3 à refroidissement liquide,
tout en
étant la première grosse cylindrée de MZ. En
observant derrière son carénage le twin incliné
à 40°, je lui trouve une ressemblance avec un Yamaha 850TDM
sur-alésé, une moto disponible en Europe depuis bon
nombre d'années. Il revendique 118 chevaux à 9000t/mn,
avec un couple maxi deux mille tours plus bas. Et bien que je n'aie pas
particulièrement d'atomes crochus avec les productions
allemandes, celui-là semble un sacré numéro.
Les gros cylindres à quatre soupapes sont alimentés en
mélange air-essence par une injection Sagem, qui fonctionne
extrêmement bien. Je n'y ai rien trouvé à redire,
et ce n'est pas faute d'essais. La puissance est délivrée
de manière lisse et soyeuse grâce au calage à
180°, et il y a de quoi faire ; il faut juste éviter de
mettre du gros gaz à bas régime sur un rapport long.
Même sur les rapports courts, le gros twin renâcle à
descendre trop bas. Il accepte de reprendre, mais vous fait part de son
mécontentement par des vibrations inconfortables transmises par
les repose-pieds et les demi-guidons.
Mais faites-le tourner un peu plus haut et vous ne vous passerez plus
de ce plaisir. Il délivre sa puissance progressivement mais
abondamment à tous les régimes jusqu'à sa zone
rouge, à 9500t/mn ; il n'y a pas de replats marqués sur
sa courbe de puissance, et il semble largement plus costaud que les
V-twins courants à l'approche de sa zone rouge. Il faut un
Aprilia Mille ou une Ducati 999 pour trouver mieux, capables de pousser
plus et plus haut. La MZ vise une place intermédiaire entre ces
motos et une Triumph 955i, mais la puissance maxi ne fait pas tout.
En dehors du circuit, j'ai apprécié la position de
conduite et la place qu'elle ménage au pilote, et la moto est
réellement agréablement confortable. Ce sera la moto
parfaite pour un usage piste occasionnel, pour le motard qui ne se
dédie pas exclusivement à la compétition.
Suffisament rapide pour donner des frissons, elle
bénéficie de freins sacrément impressionnants,
puissants et dosables. Sûr que je me suis fait enrhumer en ligne
droite par un paquet de gros cubes, mais c'est incroyable combien j'ai
pu en redoubler grâce à son gros freinage.
Rien de monstrueux pourtant, juste une bonne paire d'étriers
quatre pistons Nissin, avec des disques de 320mm au standard
compétition. La première fois que j'ai enfourché
la moto, je n'ai pas pensé qu'ils seraient au mieux sur la
piste, compte-tenu du débattement important du levier en
début d'attaque. Cela les rend superbement bien adaptés
sur route, car ils procurent beaucoup de feeling avant d'attaquer le
mordant. Une fois sur piste, ce débattement initial est vite
oublié, une fois qu'après avoir appuyé fort sur le
levier les huit pistons aient fait leur boulot. Avec une vitesse de
pointe autour de 230 km/h en bout de ligne droite, j'étais bien
content de leur puissance et tenue pour aborder le premier virage, qui
se prend en seconde à 70 km/h.
Je m'amusais avec ma femme Kristen (pas de mauvais esprit !) pendant la
session ouverte aux duos le midi, lorsque nous avons été
passés dans la ligne droite de retour par Nancy Johnson sur un
Tuono, notre hôtesse pour cette journée sur piste. Juste
pour taquiner, j'ai retardé mon freinage pour revenir dans sa
roue, puis j'ai pris le virage numéro 1 juste à son
niveau avec une grimace moqueuse sur le visage : la MZ ayant une
puissance de freinage plus que suffisante pour le surpoids !
Pour mon essai, John Stoddard avait monté un jeu de Metzeler
Sportec M1 qui se sont comportés parfaitement. Avec mes
réglages de suspension un peu souples et en ayant la main lourde
sur les gaz, je me suis bien amusé à glissouiller et
tortiller en sortie du virage serré en haut de la bute, sans
réactions brutales. Montés sur les séduisantes
demi-jantes jumelées brevetées par MZ, ces pneus se sont
avérés étonnament peu dégradés
après cette longue journée de conduite sportive.
De retour aux stands, lors d'une pause en discutant au sujet de la
moto, un thème revenait régulièrement : les gens
étaient très positifs et presque tous évoquaient
le cadre. Il va certainement marquer la différence entre la MZ
et la foule des sportives à cadre-poutres en alu,
peut-être MZ a-t-il repris cette bonne idée de Ducati et
Triumph ? Je m'attachais de plus en plus à cette moto, et la
facilité et le plaisir de conduite influaient mon jugement. La
boîte six de type à cassette permet de passer les rapports
en douceur. J'aurais pu encore mieux profiter de sa douceur si j'avais
pris de temps de décomposer quelques passages de rapports, au
lieu de bourriner. La MZ n'était pas assez rapide pour tenir
avec les meilleurs pilotes élite, mais même en prenant le
temps de m'appliquer pour quelques prises de photos, j'ai réussi
à rester avec le paquet des pilotes moyens.
En pilotant en fin de journée sur un tempo plus relax, je me
suis amusé dans un gauche en aveugle sur l'arrière du
circuit. En fondant sur le haut de la bute et en passant la quatre, je
m'écarte un peu, puis je prends ma trajectoire et bascule dans
la courbe alors que la moto approche le gras de sa courbe de puissance.
Ca passe aussi proche que possible de la perfection, alors que j'essore
la poignée de gaz en plongeant dans la descente, avant de sauter
sur les freins pour les deux derniers virages. Je tombe rapidement un
rapport, tout doux dans le virage droit, je porte mon regard au loin,
je rentre encore un rapport et je plonge dans le second virage, celui
du gros arbre. Je relève mon genou qui frôlait le sol, il
est temps d'enquiller à nouveau la ligne droite pour un nouveau
tour de pur bonheur.
Avec sa motorisation allemande fiable, son Euro design original, et un
moteur volontaire et enthousiasmant pour la route rapide, la MZ 1000S
s'avère un plaisir le jour où vous avez envie de
l'emmener faire un tour sur piste. Confortable, silencieuse et
importée aux USA en quantité limitée au prix de
11.999$, elle va probablement faire quelques adeptes : les motards qui
voudront se démarquer grâce à ses
différences, sans pour autant sacrifier la qualité, la
fiabilité ou les aspects pratiques.
Dans le mille pour miss Gros Nez !
article
original : texte et photos d'illustration,
sur http://www.motorcycle-usa.com
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