Mes machines de niveau "fort joueur de club, première catégorie et plus"

Mephisto Milano v2.00

Année : 1993
Programmeur : Ed Schröder
CPU : 65C02 @4,9Mhz
ROM : 64Ko
Niveau Elo : 1998
(1900 FIDE)
CMhz : 4,9
Rperf : 110%
KT : 1723
Taille de case : 2,5cm

J'aime les programmes de Ed Schröder... Alors pour lui faire pleinement honneur, le Rebell 5 première collaboration avec H&G était un peu seul. A l'autre extrémité de cette période de collaboration, ce Milano v2 (version du logiciel, la machine est équipée d'une ROM "Nigel Short") est à la fois l'une des dernières machines signées Schröder et l'ultime évolution de son logiciel 8 bits sur 6502, ce qu'on a fait de mieux sur ce type de processeur. Autour de 200 points Elo de plus que le Rebell 5, sur le même processeur, ça cause ! Le Milano est une jolie machine, très plate, sobre, proposée avec deux jeux de pièces pour les blancs (gris clair ou chromées) et un jeu de pièces de voyage (2D magnétiques). Pour le transport ou le rangement, un couvercle vient protéger la face plateau de jeu/clavier/afficheur. Le couvercle intègre intelligemment des surfaces magnétiques pour ranger aisément les pièces 2D (et un bloc-notes pour tracer les parties). Bref, une machine très bien conçue, aboutie, robuste, et qui propose de nombreuses fonctionnalités logicielles (entraînement, analyse à froid d'une partie, simulation d'un adversaire de niveau Elo paramétrable...). En sus de la ROM "Nigel Short" qui apporte une vingtaine de points Elo et un jeu réputé un peu plus actif, cet exemplaire acheté 74,95€ sur le eBay Allemand bénéficie d'un afficheur amélioré :






La version "Nigel Short" conserve un évident air de famille avec le Rebel 5, tout en ayant progressé dans quasiment toutes les dimensions. Les pics de force (ouverture, stratégie) du Rebel 5 sont inchangés, et la progression des autres domaines donne un profil plus "rond", plus mature. La force de calcul n'a pas progressé, ce qui s'explique : même processeur et vitesse ; et la sophistication de la fonction d'évaluation a dû augmenter, ce qui ne favorise pas la force de calcul pure. Les progrès les plus flagrants sont dans le milieu de partie, la reconnaissance des schémas tactiques, la défense et la connaissance des finales théoriques ; même si ce dernier domaine reste faible pour un jeu à ce niveau.

Novag Citrine

Année : 2006
Programmeur : Dave Kittinger
CPU : H8 @20Mhz
ROM : 56Ko
Niveau Elo : 2001
(1903 FIDE)
CMhz : 13
Rperf : 105%
Taille de case : 3,7cm

Je n'ai pas acquis ce beau Citrine (250€ sur le bon coin) pour son programme, d'expérience vraiment proche de celui de l'Emerald Classic. Il n'en diffère que par son processeur près de 50% plus rapide, et par une bibliothèque d'ouvertures un peu plus étendue. Non, la différence se fait dans le confort de jeu du plateau sensitif en bois de belle taille, et surtout dans sa connectivité au logiciel Arena sur PC, ce qui permet de profiter d'un choix énorme de moteurs d'échecs utilisables en tant qu'adversaires directs sur le plateau de jeu. Il suffit d'activer l'option "mode arbitre" du Citrine pour désactiver le programme d'origine et y substituer le moteur sélectionné dans Arena, y compris les émulations MessChess d'échiquiers électroniques (j'en ai sélectionné environ 150 dans ma configuration Arena). Le PC peut ensuite être relégué en arrière-plan, inutile de consulter son écran car les coups du moteur sont matérialisés par le clignotement des diodes (avantageusement complété par l'option d'annonce vocale des coups sur Arena). A l'usage, c'est vraiment super ! Quelques inconvénients à citer : le module d'affichage peu pratique, illisible à plat (il faut impérativement trouver ou bricoler un petit socle pour le positionner avec la bonne inclinaison) - mais on peut aussi jouer sans - et le cablage nécessaire à la connexion PC, prévu pour une connexion série et donc nécessitant une conversion USB ou Bluetooth pour un PC un tant soit peu récent. Mais le Citrine reste la solution la plus abordable pour connecter un bel échiquier auto-répondeur à un PC, et en prime c'est aussi un ordinateur d'échecs dédié...

Mephisto Chess Challenger

Année : 2004
Programmeur : Frans Morsch
CPU : H8 @10Mhz
ROM : 32Ko
Niveau Elo : 2025
(1927 FIDE)
CMhz : 6,5
Rperf : 110%
KT : 1755
Taille de case : 2,5cm

Comme pour le Sensory Chess Challenger 8, cet échiquier électronique n'était pas prévu dans ma collection. Sa raison d'être tient à son jumeau kité à 32Mhz présenté ci-dessous. En effet, alors que le tuning à 40Mhz encore en place montrait des signes de dysfonctionnements, j'ai vu passer sur eBay l'offre de cet exemplaire complet d'origine (en 10Mhz donc) et en état comme neuf pour 14,99€ en achat immédiat. Au prix d'un adaptateur secteur, j'ai donc eu à la fois un CC de rechange, au cas où l'overclocking aurait fini par griller l'autre machine, avec son
emballage d'origine, sa documentation et son adaptateur secteur ; et un jeu de pièces Saitek état neuf, parfait pour ré-équiper le GK2000. Du coup, je peux même intégrer les deux versions 10 et 32Mhz dans un même tournoi et les faire jouer l'une contre l'autre ! Cela reste une machine secondaire que je ne déballe que rarement, puisque j'utilise aussi bien le CC kité pour jouer en vitesse d'origine, grâce à son interrupteur sur le circuit d'horloge. Cette machine de rechange se contente donc des pièces d'origine du Mephisto Mirage, visibles sur les photos, et qui conviennent assez bien...
Quelques trucs à connaître sur cette machine (valables également pour la version 32Mhz présentée plus bas):
  - Comme beaucoup de clones récents du Saitek GK2100, le bug "H8" est présent. H8 ne fait pas référence au processeur, mais à la case de l'échiquier : lorsqu'une de ses pièces est sur cette case, le Chess Challenger peut la jouer sans considération des conséquences. Exemple vécu : dans cette position jusque-là équilibrée contre un Mephisto Vancouver (une machine valant de l'ordre de 150 points "Elo" de plus !) 7r/6R1/1p3p2/1pnkp3/7P/P3KP2/1P6/4B3 b - - 0 1 le Chess Challenger avec les noirs a joué Txh4 ?? et bien sûr a perdu la partie. Quelques autres exemples ici.
  - Egalement présent, le "fun level" bug - mais il suffit de ne pas sélectionner de niveau de divertissement (ou de réinitialiser la machine si on l'a fait) pour ne pas rencontrer ce bug.
  - Une procédure non documentée dans le manuel permet d'accéder à des options cachées intéressantes : éteindre la machine (touche stop) puis maintenir la touche option appuyée en même temps qu'on démarre (touches option+go). Les options additionnelles sont :
    . SEL algorithme sélectif ou force brute, une option que le GK2000 met en avant (voir la mention "selectable search strategy" sur la photo, catégorie précédente).
    . EASY pour désactiver la réflexion sur le temps de jeu de l'adversaire
    . RAND (random) pour ajouter une touche de variété dans le choix des coups
    . BOOK pour activer ou désactiver la bibliothèque des ouvertures
    . BK:FL (book full) pour pleine variété des ouvertures
    . BK:PA (book passive) pour privilégier les coups défensifs
    . BK:AT (book attacking) pour privilégier les coups actifs
    . BK:TN (book tournament) pour limiter le choix aux coups réputés les plus forts
  Le retour au menu d'options standard (par exemple, pour accéder aux parties pré-enregistrées) se fait de manière similaire en éteignant, puis rallumant avec la combinaison de touches level+go (ou en réinitialisant la machine, bien sûr).



Test de Khmelnitsky : la réalisation du test demande un peu d'attention, car l'affichage du score après interruption de la recherche, via la touche "info", est parfois inexploitable. J'utilise le niveau infini (B8) pour l'interrompre précisément après trois minutes de réflexion (ou une minute dans certains cas) ; et parfois le score est alors recalculé à la volée, avec une recherche instantanée sur un seul niveau. Il faut donc activer l'option d'affichage permanent de l'évaluation en cours de réflexion, et noter la valeur atteinte au moment d'interrompre la recherche.
Comme on pouvait s'y attendre, le Mephisto Chess Challenger présente un profil proche de celui du GK2000 du même auteur et exploitant le même processeur, mais renforcé d'une centaine de points (les 32Ko de ROM ont permis d'affiner le programme, comparés aux seulement 16Ko du GK2000). Ses forces principales restent la tactique, repérer les menaces et contre-attaquer. Pas de progrès en finale, par contre les algorithmes ont été nettement travaillés pour renforcer le jeu en milieu de partie. Le Chess Challenger est particulièrement à l'aise dans des positions compliquées avec beaucoup de matériel présent, où ses qualités tactiques s'expriment. En contrepartie, toujours en comparaison au GK2000, la qualité de jeu du programme à l'ouverture a sensiblement baissé (c'est à dire en sortie de bibliothèque d'ouverture, où beaucoup de matériel est présent mais sans encore vraiment de complexité tactique). Un joueur humain de même niveau sera sensiblement meilleur attaquant, mais sera bien avisé de rester sur un jeu simple et prudent jusqu'à atteindre la fin de partie.
Enfin, je note que le bug H8 est venu perturber le test pour 4 des 100 positions. 


Fidelity Designer Mach III Master 2265

Année : 1990
ProgrammeurDan & Kathe Spracklen
CPU : 68000 @16Mhz
ROM : 64Ko
Niveau Elo : 2029
(1930 FIDE)
CMhz : 9,6
Rperf : 108%
KT : 1974
Taille de case : 2,5cm

Je ne pouvais décemment pas laisser ma collection sans un représentant de la famille de CPUs Motorola 680x0. Les 32 bits 68020 et 68030 étant réservés à des machines très haut de gamme ( comprendre très onéreuses, et encore... sans parler des exceptionnels 68040 et 68060 ! ), le 68000 (16 bits) avait l'avantage de mieux rentrer dans mon budget (machine acquise sur eBay, complète avec emballage d'origine, sans adaptateur secteur, pour 250€). Outre sa vitesse sensiblement supérieure à celle d'un 6502 (8 bits), le 68000 peut adresser plus de 64Ko (jusqu'à 16Mo), ce qui a permis aux époux Spracklen d'exploiter des tables de transposition, introduites à partir de l'Excel 68000 de 1987. Avec ce Designer Mach III, 64Ko de RAM leur sont consacrés (plus 16Ko pour les autres besoins du programme, soit 80Ko RAM au total). Ce n'est pas énorme, mais cela se voit nettement en fin de partie, où la profondeur de recherche (affichable) croit sensiblement, et bien sûr le niveau de jeu s'en ressent très positivement. Le Mach III est au top des versions du programme des Spracklen : il existe bien sûr des machines plus fortes, mais c'est grâce à leur vitesse supérieure et à l'augmentation de taille des tables de transposition. La série des Elite Avant-Garde, le Mach IV Master 2325 et même Sargon V (le dernier Sargon, datant de 1991) ne font pas mieux en Rperf. La mention 2265 fait référence à la performance de l'Excel Mach III
(mêmes caractéristiques hardware et même programme, mais dans un boîtier nettement moins joli), certifiée par l'USCF (United States Chess Federation), à l'issue de parties de tournoi face à des joueurs classés. Ce qui lui a valu le titre officiel de Maître National, voir la photo ci-dessous. J'ai eu des soucis avec l'alimentation électrique de cette machine : OK sur piles, mais aucun adaptateur secteur n'a donné de résultat fiable. J'ai essayé une alimentation moderne stabilisée en 6V, 7,5V ou 9V sans succès ; idem avec une alimentation non stabilisée (origine Fidelity 9V ou HGN 5001 8,5V : même résultat). Le Designer démarrait parfois mais le plus souvent plantait avec un afficheur au contenu aléatoire, et des diodes s'allumant elles-aussi aléatoirement. Une fois démarré, il fonctionnait de quelques minutes à environ une heure avant de planter à nouveau avec les mêmes symptômes. J'ai simplement modifié le câblage du connecteur électrique de l'échiquier pour que l'adaptateur secteur alimente le circuit imprimé en parallèle au circuit des piles, ce qui nécessite bien sûr l'emploi d'un adaptateur secteur 6V stabilisés (en mode piles, 4 piles de 1,5V en série, soit 6V). L'interrupteur on/off fonctionne toujours, et utiliser des piles en dépannage reste possible (sans brancher le secteur bien sûr). Solution validée après plus de quatre heures de fonctionnement continu sur secteur !






 J'avais hâte de pouvoir mesurer les progrès du programme des Spracklen, depuis l'Excellence de 1985, à l'aide du test de Khmelnitsky. La constance de la force de jeu, de la sortie des ouvertures au milieu de partie et jusqu'en finale est toujours bien présente, un cran au-dessus. Le progrès en matière de finales théoriques est spectaculaire ! Calcul, tactique et défense ont également nettement progressé, aidés par le processeur rapide et les tables de transpositions. Le programme est efficace à détecter les menaces, et reste plus à l'aise en défense qu'en attaque.

Mephisto Chess Challenger 32Mhz (kité)

Année : 2004
Programmeur : Frans Morsch
CPU : H8 @32Mhz
ROM : 32Ko
Niveau Elo : 2126
(2025 FIDE)
CMhz : 20,8
Rperf : 109%

KT : 1840
Taille de case : 2,5cm

Après le GK2000 grand frère du Mephisto Europa, j'ai trouvé un aîné pour la famille ! Ce Mephisto (par Saitek, c'est précisé dessus) est un clone du GK2100 paru en 1994, un peu plus d'un an après le GK2000, et amélioré sur le plan du logiciel (de l'ordre de 50 points Elo supplémentaires) avec une ROM étendue à 32Ko, et un programme probablement basé sur Fritz 2 paru en 1993. Pas de quoi faire le trou avec le GK2000 toutefois, je n'ai donc pas cherché à l'intégrer à ma collection : trop similaire tant en niveau qu'en style de jeu. En revanche, avec une fréquence d'horloge initialement quadruplée, soit 40Mhz à la CPU, cette machine méritait attention ! D'autant qu'elle était proposée complète, avec emballage d'origine, pièces, documentation et adaptateur secteur, en état comme neuf, sur le eBay Allemand pour 64€. Cerise sur le gâteau, le tuning à 40Mhz avait été réalisé avec soin, puisqu'un interrupteur logé dans le compartiment des pièces permet de basculer à volonté (machine éteinte, tout de même !) sur la fréquence d'origine (soit 10Mhz). Et heureusement, car la bête s'est montrée capricieuse lors de mes premiers essais. J'ai commencé par un test de performance, avec une position du BT-2630 pour laquelle le temps du GK2100 était documenté, et suffisament long (près de 4 minutes). Le Chess Challenger en position 10Mhz affiche le coup escompté dans le même temps que le GK2100, puis effectivement exactement quatre fois plus vite (au chronomètre de précision) une fois basculé en 40Mhz. Bien, ça fonctionne parfaitement ! Je passe donc à des parties complètes pour tester le niveau de jeu contre divers adversaires de niveau estimé équivalent. Et là, déception... Malgré sa vitesse de calcul, le Chess Challenger non seulement ne domine pas son sujet, mais il perd ou manque des gains sur des bourdes évidentes, même pour moi à mon faible niveau. Par exemple, sur la position photographiée ci-dessus, partie gagnée avec les blancs, il joua tour en e7?? au niveau une minute par coup. Et les bourdes sont fièrement créditées de scores tout à fait favorables, lequel score chute dramatiquement dès l'entrée de la réfutation adverse, sans que le Chess Challenger ait besoin de calculer profondément... Je reviens en arrière et relance le calcul en mode 10Mhz, pas mieux, même bourde... Je fouille quelque temps autour du "fun level bug" bien connu concernant beaucoup de clones du GK2100, mais non, le remède connu ne fonctionne pas (presser ACL - all clear puis prendre soin de ne pas activer un des niveaux de divertissement, où le programme offre exprès une pièce de temps en temps). Il me faudra de nombreux essais pour m'apercevoir que parfois, sur la même position de test, le CC joue un coup correct aussi bien en  mode 40 que 10Mhz ; et répétitivement ne commet plus sa bourde tant que je ne le réinitialise pas. Puis j'affine, c'est tant que je ne le réinitialise pas en mode 40Mhz. Et bingo, je reproduis systématiquement la bourde si je démarre en 40Mhz, même si je repasse à 10 après ; et le CC joue parfaitement si je l'initialise en 10Mhz, y compris si je le passe en 40Mhz dès après initialisation. L'initialisation étant soit la première mise sous tension en branchant l'adaptateur, soit une pression sur ACL. Le CC exécute alors une sorte de test (les diodes s'allument en séquence, et un affichage particulier défile à l'écran) qui doit également servir à initialiser des données en RAM utiles au jeu ultérieur. Cette phase ne supporte pas la fréquence à 40Mhz et les données sont alors certainement corrompues, peut-être simplement incomplètes. J'ai cru un temps stabiliser le fonctionnement en utilisant un jeu de piles en sus de l'adaptateur secteur, évitant ainsi de devoir réinitialiser la machine, mais la combinaison de touches New Game s'est avérée parfois recréer une instabilité. Pour une sécurité totale, je procède donc désormais systématiquement à une réinitialisation en mode 10Mhz avant toute nouvelle partie. Puis je rebascule en 40Mhz, et voilà, retour au niveau 1ère catégorie !
Mise à jour : lors d'une période de canicule (31°C dans la pièce où je jouais avec le CC), j'ai reproduit malgré le protocole de démarrage en 10Mhz des anomalies d'évaluation flagrantes (menant à perte immédiate d'une pièce) que le CC 40Mhz commet systématiquement (en revenant en arrière sur le coup défaillant et relançant la recherche), sauf à insérer une petite période d'arrêt (touche "stop") avant de le réactiver et relancer la recherche. Il joue alors correctement, avec la même évaluation qu'en mode 10Mhz ; mais en réessayant quelques dizaines de secondes plus tard, à chaud, il reproduit systématiquement l'évaluation erronée. Conclusion : 40Mhz, c'est trop...
Un site de composants électroniques proposait des oscillateurs à crystal de quartz 32Mhz, par deux pour 1€... J'ai donc ressorti mon fer à souder avec l'espoir que si le CC ne dysfonctionnait que rarement et dans des cas de figure précis à 40Mhz, il aurait une marge de fiabilité suffisante en 32Mhz. Eh bien, tout est revenu dans l'ordre ! Test BT-2630 OK, réponse 3,2 fois plus vite qu'en vitesse d'origine comme attendu. Test de démarrage à froid directement switché sur 32Mhz, impossible de reproduire l'anomalie qui, auparavant, nécessitait de démarrer en 10Mhz. Test à chaud, impossible de reproduire le cas de figure qui perturbait le mode 40Mhz ! La vitesse moindre devrait techniquement coûter environ 25 points Elo en termes de performance, dont une partie tout de même devrait être compensée par la fiabilité restaurée des évaluations. Le voici donc ré-étiqueté :

Maintenant que la qualité de jeu est fiable, ce programme Morsch 32K sur matériel rapide s'avère redoutable, capable d'accrocher les meilleures machines jusqu'à la fin du milieu de partie. Mais à ce niveau de jeu, il doit absolument avoir pris un avantage avant d'aborder la fin de partie, pour espérer gagner. Ce constat basé sur l'expérience est tout à fait cohérent avec le profil de compétences du programme (voir le test de Khmelnitsky du modèle standard 10Mhz, plus haut dans cette page). Voici une comparaison directe des deux versions, 10 et 32Mhz :



Le gain en vitesse (x3,2) permet de compenser la faiblesse principale (en sortie de bibliothèque d'ouverture) du Chess Challenger standard. Les autres dimensions s'améliorent légèrement, pour un gain global de 85 points "KT". Curieusement, la dimension calcul régresse légèrement, dû à une réponse correcte du programme en début de réflexion et portée au crédit du CC 10Mhz, évoluant plus tard vers une piste incorrecte. Mais cela signifie aussi que sur les 16 autres positions contribuant à cette dimension, la version 32Mhz ne fait pas mieux que la version 10Mhz.

Mephisto Berlin

Année : 1992
Programmeur : Richard Lang
CPU : 68000 @12Mhz
ROM : 128Ko
Niveau Elo : 2172
(2071 FIDE)
CMhz : 7,2
Rperf : 117%
KT : 2061
Taille de case : 2,5cm

Mon choix d'intégrer ce Berlin 68000 à ma collection a mûri assez longtemps et a suivi un chemin un peu particulier. Tout d'abord, il me manquait un représentant des meilleurs programmes de Richard Lang, c'est à dire un de la série Almeria - Vancouver (1988-1991). Après les succès de la 1ère série Mephisto Amsterdam / Dallas / Roma (1985-1987), l'auteur a restructuré son code en intégrant notamment les tables de transposition, et une sélectivité retravaillée ; renouvelant ainsi sa totale domination des championnats du monde d'échecs sur micro-ordinateur (WMCCC). Le Vancouver est le plus abouti de la série, et le plus réussi des programmes de Richard Lang, alliant force et style de jeu. Sur échiquier électronique, il ne sera dépassé en force que par le Chess Genius 68030 et par les ROM "London upgrade" proposées par l'auteur (et non par Hegener & Glaser). La version "London" est la rétro-adaptation, pour machines Mephisto, de Chess Genius 3 sur PC qui a marqué les esprits par sa victoire à Londres en 1994, sur Pentium 90, aux dépens de Kasparov. Les versions originales Mephisto, et en particulier le Vancouver, gardent toutefois sur ces versions ultérieures l'avantage d'un jeu plus actif ! J'ai un temps rêvé acquérir un plateau Mephisto München équipé du Vancouver, et simplement perdu du temps et de l'argent : l'opportunité n'était qu'une escroquerie. A la réflexion, par manque de place, il ne m'aurait pas été pratique de jouer avec un plateau de la taille du München... Et c'est ici qu'intervient le Berlin. Sous la même forme robuste et compacte que le Milano, il intègre le moteur de jeu du Vancouver, et le même processeur 68000 que le Vancouver 16bits. Des options de menu relativement secondaires du Vancouver ont été supprimées pour réduire sa ROM à 128K, tandis que la RAM est identique (512Ko, largement utilisés pour les tables de transposition). Son classement Elo est bien évidemment le même que celui du Vancouver, avec même quelques menus points additionnels mis sur le compte d'un peu de correction de bogues. Echaudé après ma tentative d'achat du Vancouver auprès d'un inconnu, j'ai acquis le Berlin 68000 via un site Allemand de collectionneurs - une démarche coûteuse mais bien plus fiable. La machine y était en vente à 270€, en très bon état, complète et parfaitement d'origine. Le style de jeu est tout à l'opposé de celui des programmes Spracklen, qui sont toujours prêts à attaquer à outrance la moindre faille pour manger du matériel, fût-ce au prix de la cohérence de leur propre position (une tendance qui vaudra à leur style le sobriquet de "jungle chess"). Non, avec Richard Lang, le jeu est sûr, simple, limpide ; se contentant la plupart du temps de construire de petits avantages positionnels qui s'avèrent souvent gagnants après simplification. Une image me vient à l'esprit pour illustrer ce style : jeune, j'ai beaucoup lu les aventures dans le Grand Nord, des écrivains Jack London ou J.O. Curwood. Parmi ces livres, Croc-Blanc. Le héros gagne tous ses combats face aux autres chiens de Fort Yukon, jusqu'à sa rencontre avec un bulldog... Je cite quelques extraits le décrivant : "Il avait, de toute évidence, un but qu’il se proposait et une méthode pour arriver à ce but. Le reste ne comptait pas et ne devait pas le distraire". "Le bulldog se contentait, à peu de chose près, de conserver son emprise". "les mâchoires qui le tenaillaient, par un imperceptible mouvement de mastication, portaient plus haut leur emprise. Patiemment, elles travaillaient à se rapprocher de sa gorge". Eh bien, ces phrases s'appliquent admirablement aux programmes Lang : une fois un petit avantage pris, la construction de la victoire est méticuleuse et bien souvent imparable !



Test de Khmelnitsky : un profil assez plein, avec un point faible marqué pour l'attaque (ce qui ne surprend pas, connaissant le style de jeu de ce programme) et un jeu positionnel (stratégie) moins performant que les autres domaines. La phase d'ouverture est très forte, en transition vers un milieu de partie solide puis une légère baisse en finale (tant théorique que pratique). Solide défenseur, le programme identifie les menaces et les schémas tactiques pour contre-attaquer. C'est enfin un bon calculateur, il dispose tout de même d'un 68000 et de tables de transposition !

CT800

Année : 2016 (prototype), 2021 (cet exemplaire)
Programmeur : Rasmus Althoff
CPU : ARM Cortex M4 @8--240Mhz
ROM : 263Ko (sur 1Mo flash)
Niveau Elo
@168Mhz 2281 (2178 FIDE)
Niveau Elo @16,8Mhz 2030 (1931 FIDE)
CMhz : 490 (nominal @168Mhz)
Rperf : 103%
KT : 2144

Ceci n'est pas un échiquier électronique (voyez-vous un échiquier ?) mais bien, comme aux tout premiers temps, un jeu d'échecs électroniques au format calculateur, rappelant la fameuse briquette Mephisto ou même, de par sa taille et son large afficheur, le tout premier Boris ! La genèse de ce CT800 nécessite de citer plusieurs contributeurs :
- R
asmus Althoff est non seulement le programmeur (il fournit le micro-code qui évolue régulièrement, ici en version 1.42) mais il est surtout l'auteur, père du projet qu'il partage en FLOSS (free/libre open source software) ; voir son site dédié
- Vitali Derr a rationalisé le hardware (circuit imprimé, alimentation, interfaces, panneaux...) afin d'en permettre la construction à coût raisonnable (je lui ai acheté cet exemplaire 130€) ; plus d'infos ici
- George Georgopoulos est l'auteur du moteur d'échecs initial (NG-Play), porté sur le microprocesseur ARM par R. Althoff (puis significativement retravaillé par ce dernier, sans oublier l'ajout d'une bibliothèque d'ouvertures)
- enfin, Marcel van Kervinck est l'auteur de l'algorithme de fin de partie Roi + Pion contre Roi (table "bitbase").

Le coeur du CT800 est une carte Olimex STM32 (voir photo ci-dessous) qui permet de développer un système autour du microcontrôleur ARM
Cortex M4, un processeur RISC 32 bits (même CPU que les Millennium Chess Genius et Chess Genius Pro). Seulement 192Ko RAM sont disponibles (dont 100Ko affectés aux tables de transposition) ; un défi pour adapter un programme moderne ! La fréquence d'horloge nominale est de 168Mhz, mais le logiciel du CT800 permet de brider la vitesse de calcul à des vitesses intermédiaires jusqu'à un minimum de 10% (soit 16,8Mhz) et même, dans l'autre sens, de le pousser à 130 voire 145% (240Mhz au maximum). Enfin, notons qu'en mode d'attente de l'utilisateur (entrée de coup, choix de menu...), l'horloge passe en mode de veille à 8Mhz (avec en principal avantage une économie d'énergie). Cette fonctionnalité va de pair avec l'absence de réflexion permanente sur le temps adverse. J'ai toujours eu une préférence pour les programmes d'échecs dotés de cette anticipation, mais je dois reconnaître qu'elle ne manque pas sur le CT800 : non seulement le niveau est déjà (largement !) suffisament fort, mais aussi le programme identifie vraiment bien les coups "évidents" (en sus des coups forcés légalement, bien sûr) pour les jouer quasi-instantanément. Et c'est bien là le résultat attendu, que ce soit grâce à une réflexion permanente ou grâce au code intelligent du CT800 : un jeu naturel, où l'ordinateur exécute rapidement le ou les coups logiques faisant suite, par exemple, à une séquence d'échanges. Plus généralement, le CT800 semble particulièrement performant à la pré-sélection de ses coups : grâce au mode d'information affichant sa réflexion en cours, j'ai remarqué qu'il convergeait très rapidement (souvent instantanément !) vers le coup qu'il va très probablement jouer - il change d'avis relativement rarement, au fil de la profondeur de sa réflexion. Cela lui donne un côté "intuitif" plaisant, même si c'est pousser un peu loin l'anthropomorphisme. Mais très concrètement, il réussit, au test de Khmelnitsky, un score cohérent avec son niveau Elo FIDE, et ce test est conçu pour les humains... Donc, si l'auteur précise avoir orienté et développé le style de jeu dans le sens "anti-humain" (évitant les positions fermées et les échanges de pièces prématurés, favorisant la mobilité... donc visant à conserver de la complexité pour le cerveau humain), il semble avoir obtenu (en bonus attendu ou pas !) un style de jeu intéressant, assez naturel, qui pourrait être celui d'un joueur un peu passif (le CT800 a tendance à "laisser venir" son adversaire) mais recherchant la complexité, pour contre-attaquer au bon moment.



Le coeur du CT800 : carte Olimex STM32-H405




Test de Khmelnitsky : l'auteur a travaillé les finales, et ça se voit ! La stratégie ainsi que le calcul long terme et les plans d'attaque restent des points faibles assez usuels des programmes d'échecs, mais comme déjà évoqué, le CT800 brouille les pistes pour compenser face aux joueurs humains ; et il défend bien, reconnait les schémas tactiques, repère les menaces et cela lui permet de contre-attaquer. Il joue bien en sortie de bibliothèque d'ouvertures et tient ensuite son rang en milieu de partie, avec même une capacité (rare !) à identifier les opportunités ou menaces de sacrifice.

Millennium Chess Genius Pro

Année : 2016
Programmeur : Richard Lang
CPU : ARM Cortex M4 @120Mhz
ROM : 16Ko + 1024Ko flash
Niveau Elo : 2296
(2192 FIDE)
CMhz : 350
Rperf : 105%
KT : 2144
Taille de case : 2,4cm

J'ai longtemps hésité avant d'acheter cette machine, deux ans après sa sortie. Je n'étais pas en manque de forts programmes de Richard Lang, entre les versions Chess Genius sous DOS, les émulations Mephisto (Dallas, Roma, etc... jusqu'au Genius 68030 London), et la version Androïd du même Chess Genius dont je dispose sur une tablette bien plus puissante (évaluée 8800 CMhz). Mais bouder un échiquier électronique de fort niveau, produit malgré le déclin de longue date de ce marché, m'a semblé injustifiable. Le moteur, identique à celui sur Androïd ou iOS (programmé en language "C"), semble être issu d'un portage de la série Amsterdam - Roma (un Amsterdam amélioré ou un Roma allégé) et n'est pas le plus performant des programmes de R. Lang : ses meilleures productions (
alors programmées en assembleur 68000 ou 80x86) approchent les 120% en Rperf. Cependant, la puissance du CPU Risc ARM vaut à cette petite machine un niveau Maître National. Elle dispose de 128Ko RAM (sur 160) pour ses tables de transposition (hash tables) et de deux bibliothèques d'ouvertures sélectionnables, dont une dite moderne de 100.000 positions (Hiarcs book), et une classique de 57.000 positions (London book). L'échiquier semi-sensitif est trop raide, nécessitant une pression importante sur les cases (et il parait qu'il a été amélioré comparativement au prédécesseur, le Millennium Chess Genius !). A l'usage, je me suis aperçu que la sensibilité n'est pas si mauvaise, mais elle est limitée au point central de chaque case. Donc si la case ne réagit pas, plutôt que d'appuyer plus fort, il suffit de faire légèrement rouler le bout du doigt vers son centre. Et si on appuie plein centre d'emblée, la réactivité est correcte. Autre petit défaut, une trappe sous la machine est sensée permettre de ranger les pièces, mais rien à faire, elles ne rentrent pas dans cet étroit logement... Initialement  vendu autour de 200€, j'ai pu l'acheter neuf en promotion 150€, adaptateur secteur et port (depuis l'Allemagne) compris !



Test de Khmelnitsky : le profil s'arrondit encore, comparé à celui du Mephisto Berlin du même auteur ; avec des progrès en milieu de partie, et une meilleure vision des sacrifices. J'interprète ce dernier point comme révélateur d'une sélectivité réduite (le programme consacre du temps d'analyse même aux coups à première vue perdants). La force de calcul diminue, malgré le processeur nettement plus rapide ; ce qui vient corroborer mon interprétation d'une analyse plus large, mais moins profonde. C'est tout à fait cohérent avec l'hypothèse déjà évoquée d'un portage de la série Amsterdam - Roma ; la série suivante des programmes Lang ayant introduit une sélectivité nettement accrue. Le niveau de jeu en finale est au niveau de celui du Berlin, avec même de légers progrès au regard des finales théoriques. Le gain en force tactique est sensible, alors que stratégie et attaque restent des caractéristiques un peu faibles. Notons qu'il obtient le même score que le CT800 à ce test, avec qui plus est un profil de compétences pratiquement identique (comparez !).

Millennium The King Performance

Année : 2019
Programmeur : Johan de Koning
CPU : ARM Cortex M7 @10--
300Mhz
ROM : 16Ko + 2048Ko flash
Niveau Elo @300Mhz : 2520 (2412 FIDE)
Niveau Elo @10Mhz : 2285 (2181 FIDE)
CMhz : 1500
Rperf : 109%
KT : 2339
Taille de case : 4cm

Contrairement au Chess Genius Pro ci-dessus que j'ai longtemps hésité à acheter, j'ai pré-commandé le King Performance dès avant sa disponibilité sur le marché (au prix standard, soit 349€). Je tenais à intégrer Johan de Koning dans ma collection, mais son programme "The King" n'existait jusqu'alors que dans des machines hors de prix (Saitek RISC 2500, Mephisto Montreux, Tasc R30/R40, ou plus récemment Millennium Exclusive +
The King Element). Le King Performance n'est pas donné, mais c'est un bel échiquier, de grande taille, semi-sensitif (les cases sont bien plus réactives que celles du Chess Genius Pro), avec un affichage riche et quatre LEDs par case. Le programme "The King" est reconnu à la fois pour sa force et sa qualité de jeu, mais aussi pour sa capacité intéressante à configurer des personnalités - et l'échiquier électronique permet d'en sauvegarder trois personnalisées à volonté, en sus des cinq styles prédéfinis (défensif, solide, normal, actif, agressif). Non seulement le style de jeu du programme peut ainsi être adapté, mais aussi le matériel, puisque la vitesse CPU peut être ajustée par pas de 10Mhz, de 10 à 300Mhz. Le King Performance offre donc plusieurs machines en une ! Et à vitesse maximale, il joue au niveau Maître International... Les versions 3.xx de The King sur PC (à partir de Chessmaster 8000) ne m'avaient pas totalement convaincu, en revanche j'ai beaucoup apprécié et joué avec la version 2.55 qui était au top dans les années 1997 à 99 (Chessmaster 5000 et 5500, Tascbase King 2.55). La version intégrée au King Performance (identique à celle du King Element) est la 2.61 de 1998 (moteur de Chessmaster 6000 et 7000), retravaillée par JdK lui-même pour Millennium. 320Ko RAM sont disponibles pour les tables de transposition, plus 64Ko pour les autres besoins. Deux livres complets d'ouvertures sont activables, dont un moderne d'environ 300.000 positions (Master book) et un classique d'environ 61.000 positions (Aegon'94 book). Une fois épuisée une ligne de jeu dans le livre activé en premier, la recherche se poursuit dans le second, s'il a été activé. Sept lignes de jeu spécialisées sont également disponibles, ainsi qu'un emplacement pour un livre supplémentaire téléchargeable depuis le site de Millennium. La cerise sur le gâteau ? Le programme peut jouer aux variantes Fischer à position initiale aléatoire, dites FRC (Fischer Random Chess, ou Chess960).
A noter également, et utile vu le niveau de jeu de cet échiquier électronique, l'existence de huit niveaux dits "faciles" pour lesquels le nombre de positions analysées à chaque coup est limité. Bien sûr la réflexion permanente est désactivée pour ces niveaux. Le réglage de vitesse du processeur n'influe pas, le programme joue quasi instantanément. Sa réflexion est  limitée (sévèrement, dans le cas des niveaux les plus bas !) mais pas dénaturée par des artifices. Un effort collectif a été fait pour évaluer ces niveaux ; j'en ai retenu le tableau suivant, après 123 parties jouées contre divers échiquiers électroniques de niveau connu (réglés sur 30s/coup) :

Niveau facile 0 1 2 3 4 5 6 7
Max positions/coup 125 250 500 1000 2000 4000 8000 16000
Elo estimé 1055 1254 1438 1607 1763 1904 2031 2143
Elo estimé (FIDE) 1183 1332 1470 1598 1714 1820 1932 2042
Mise à jour : depuis la version 1.40 du microcode (déc. 2020), les niveaux faciles ont été améliorés, autorisant un plus grand nombre de positions analysées dans la phase de fin de partie ; et les niveaux Elo ont été recalibrés: 9 niveaux désormais, échelonnés de 1000 à 2050 Elo (FIDE). Les données ci-dessus sont donc obsolètes pour ceux ayant réalisé cette mise à jour. Et à ce propos, la nouvelle version introduit des niveaux "de confort", qui sont adaptatifs (Jouez et Gagnez, Amical, Normal, Avancé) : une fonctionnalité géniale ! Autres apports intéressants à signaler, la possibilité de sauvegarder jusqu'à neuf parties dans la mémoire du King Performance ; et le choix entre un nouveau mode menu simplifié (pour l'utilisateur occasionnel) ou le mode menu "expert" déjà connu (donnant accès à tous les réglages possibles).

Grâce au
test "Spacious_Mind reloaded" (pour plus d'infos, voir le Tiger Grenadier), j'ai pu échelonner jusqu'aux niveaux "fun" du King Performance :



Le petit programme PGN_tool (téléchargeable gratuitement sur le site de Millennium) permet un échange de partie ou position entre le King Performance et un PC sous Windows, via un câble USB 2.0 (type A mâle vers B mâle). C'est non seulement très utile pour sauvegarder une partie jouée sur le King Performance (et éventuellement l'analyser à froid ultérieurement sur le PC), mais aussi pour charger une position à analyser - ce qui a grandement facilité l'exécution du test de Khmelnitsky dont j'avais préalablement confortablement saisi les positions sur mon PC. Avec le King Performance en mode analyse continue (300Mhz et style normal), il suffisait de lui transmettre chaque position pour qu'il démarre sa réflexion instantanément :



Ce profil frappe par sa régularité en sus du haut niveau : il est très plein et équilibré, avec pour seuls points un peu moins forts (je n'ose dire faibles !) la transition en sortie de bibliothèque (ouverture), la stratégie, l'attaque et, dans une moindre mesure, la force de calcul. Il ne faut pas compter sur la fin de partie pour surprendre le King Performance, il maîtrise cette phase aussi bien dans la théorie que la pratique. Sa plus grande force est dans la reconnaissance de schémas tactiques lui permettant de déclencher de puissantes contre-attaques en dépit de la capacité de calcul un peu limitée, démontrant des qualités logicielles qu'on retrouve avec les niveaux faciles : même limité en nombre de positions analysées, le King Performance peut surprendre son adversaire. Enfin, sa maîtrise des opportunités de sacrifice est une qualité rare parmi les échiquiers électroniques, voire même parmi les programmes sur PC contemporains de la version à base du King Performance (datée de 1998).

Femuey (ou Vonset) L6 v2

Année : 2023
Programmeur : équipe Vonset
CPU : ARM cortex-A7 x2 @1Ghz
ROM
non communiquée
Niveau Elo 2529 (2420 FIDE)
CMhz : 8800
Rperf : 102%
KT : 1954
Taille de case : 2,8cm

Il s'agit ici du successeur du Vonset L6 présenté dans la catégorie "joueur de club faible, quatrième catégorie".  Ce n'est pas la marque qui les distingue, le L6 v1 existant lui aussi sous l'étiquette "Femuey" aussi bien que "Vonset". Au niveau logiciel, on peut les distinguer via le nombre de niveaux de jeu, qui est passé de 20 pour le v1 à 22 pour le v2. On peut aussi se référer à l'option "about" du menu qui indique les versions logicielles et matérielles : cet exemplaire a pour version matérielle 2.2.1 (le v1 de ma collection est en version 1.0.1), et pour version logicielle 1.6.13b (1.0.12b pour mon v1). Ce nouveau L6 conserve tous les attributs que j'ai appréciés avec son prédécesseur : un plateau de jeu réactif avec une détection des mouvements de pièces fonctionnant parfaitement, des codes couleurs attractifs pour aider les débutants, un affichage de qualité et de nombreuses fonctionnalités utiles. J'ai noté plusieurs petites améliorations appréciables : la diction vocale (en anglais) légèrement ralentie est désormais parfaite, il n'est plus besoin d'un "push-pin" pour opérer un reset de la machine, la navigation dans les parties mémorisées a été améliorée (accès immédiat en fin de partie possible), le comportement des niveaux de jeu pour débutants est nettement meilleur (apte à parachever sa partie par un gain en cas de nette domination). Mais surtout, il a gagné en vitesse de calcul avec son processeur désormais double-coeurs à 1Ghz, qui lui permet une réponse instantanée même à son plus  fort niveau ; au point que son horloge concèdera à peine une ou deux secondes de réflexion pour toute une partie ! Du coup, l'affichage des horloges est surtout utile pour le mode à deux joueurs, ou pour contrôler votre propre temps de réflexion. L'accélération matérielle ne suffit cependant pas à expliquer le saut quantique réalisé par le niveau de jeu : le logiciel a largement évolué, et s'appuie certainement sur un moteur d'échecs extrêmement puissant.



On le voit nettement ici grâce à son profil, tracé en utilisant le test de Khmelnitsky, et qui se révèle plus de 500 points KT supérieur au score du L6 v1 ! J'ai dû ruser un peu pour réaliser le test, car le score instantané qu'affiche le logiciel après un coup joué ne permet pas à lui seul d'évaluer l'équilibre de la position : il faut avancer de plusieurs coups dans la variante principale pour voir le score converger vers une valeur significative. J'ai donc exploité le jeu instantané du L6 v2, en utilisant alternativement la fonction "hint" (coup conseillé) et le jeu naturel en réponse du L6, pour explorer sur quelques coups (généralement quatre ou cinq), en une trentaine de secondes de temps opérateur, l'évolution du score et retenir sa valeur stabilisée. Le temps de réflexion utilisé par le L6 reste ainsi tout-à-fait marginal (inférieur à la seconde), à comparer aux trois minutes que j'octroie en standard aux autres ordinateurs. Qu'il soit en v1 ou v2, le L6 n'est décidément pas conçu comme un outil d'analyse ! En revanche, quel joueur ! Il est très fort en contre-attaque, gère bien l'ouverture, et est exceptionnellement fort sur le plan de la stratégie, surpassant même un joueur humain de niveau équivalent. Par contre, il n'est pas un grand attaquant, et est un peu faible dans les domaines de la tactique et du sacrifice (la petite faiblesse tactique étant certainement liée au jeu instantané).

J'ai utilisé le test "Spacious_Mind reloaded" (pour plus d'infos, voir le Tiger Grenadier) afin de qualifier les niveaux intermédiaires des deux versions du L6, voici le graphe résultant :



On constate une bonne distribution des niveaux pour les deux versions, avec particulièrement une belle régularité du V1 sur les niveaux pour débutants ; en revanche il plafonne dans ce test à compter du niveau 15, malgré l'allongement progressif de ses temps de réponse. Le V2 brise ce plafond de verre et confirme via le test passer la barre des 2500 points malgré sa réponse instantanée. Impressionant ! J'ai aussi noté un fait intéressant en réalisant le test : la variété des coups joués en passant d'un niveau à l'autre. Ainsi, l'accroissement du score n'est pas systématiquement obtenu par la sélection des mêmes bons coups plus quelques-uns supplémentaires ; le programme peut choisir des coups légèrement inférieurs et finalement compenser avec des coups mieux choisis par ailleurs. Un comportement appréciable pour l'entraînement.

DGT Centaur

Année : 2019
Programmeur : équipes DGT & Stockfish
CPU : ARM11 @1Ghz
ROM : N/A (carte micro-SD)
Niveau Elo : 2881
(2766 FIDE)
CMhz : 2900
Rperf : 121%
Taille de case : 4,8cm

Un échiquier électronique atypique, c'est le moins qu'on puisse dire ! Il l'est par son design, sa technologie, sa conception logicielle, sa cible d'utilisateurs ; pour ne citer que les principaux domaines. Quelques explications s'imposent !
Commençons par sa cible : il vise les joueurs d'échecs souhaitant un partenaire électronique s'adaptant à leur niveau quel qu'il soit, hyper simple d'utilisation, pour jouer immédiatement des parties dans des conditions les plus naturelles possibles. Pour tenir ce cahier des charges, il offre un échiquier de grande taille (quasi à la norme compétition de 5cm par case) ; une détection des coups joués très efficace et non contraignante (il est bien sûr sensitif, et il scanne l'intégralité de l'échiquier pour interpréter les changements de position et donc les coups joués - ce qui autorise toutes les façons de manipuler les pièces, y compris les glisser, et n'impose aucun ordre particulier pour les captures) ; et il offre un jeu adaptatif réglable sur simplement deux niveaux (Amical ou Difficile). Corollaire immédiat : il ne vise pas les explorateurs de réglages fins via de riches menus d'options, ni les adeptes d'analyses poussées ; il n'a aucune connectivité PC et ne permet même pas de sauver une partie terminée avant d'en entamer une nouvelle, et ne propose que peu de réglages de temps de jeu : sans (il joue alors en 10s/coup environ), ou de 2 à 90 minutes pour la partie. Non, son truc, c'est de proposer une partie à tout moment, sans contraintes ni chichis (même pas un câble d'alimentation, sa batterie assurant une excellente autonomie). D'ailleurs, même éteint il affiche en permanence son credo : Let's Play!



Sa conception logicielle est tout aussi exceptionnelle : Stockfish 9 est intégré en moteur de calcul, mais pas en moteur de jeu ! C'est une couche développée avec Python Chess qui joue, prenant en charge l'adaptativité et les quelques fonctionnalités d'affichage de score et d'analyse. Pour afficher le score d'une position, il est fait appel à Stockfish avec environ 10 secondes de calcul en mode Expert, ou 3 secondes en mode adaptatif (où l'utilisateur est a priori moins exigeant). Ce n'est donc pas le score du dernier coup joué par l'ordinateur ! Et ça se comprend très bien, puisque le dernier coup de l'ordinateur est potentiellement un coup inférieur choisi pour s'adapter au niveau de l'adversaire. Le mode Expert est le seul à jouer systématiquement le meilleur coup, donc c'est ici Stockfish 9 qui s'exprime, quoique limité (pas de réflexion sur le temps de jeu adverse, calcul de trois variantes en parallèle). En fait, le mode de calcul multi-PV (plusieurs variantes principales) est à la base du système d'analyse et d'adaptabilité. Le Centaur fait systématiquement appel à son moteur de calcul Stockfish dans ce mode multi-PV, et garde en mémoire les 10 meilleurs coups de chaque position de la partie (10 en mode adaptatif, et 3 seulement en mode Expert), avec la note calculée par Stockfish pour chacun de ces coups. Limiter à 3 PV en mode Expert permet à Stockfish de calculer plus profondément à temps de réflexion égal, et ce n'est pas neutre : avec 10 PV, la vitesse de calcul est divisée par 9, ce qui représente une perte de l'ordre de 200 points Elo en comparaison au calcul d'une seule variante principale. Heureusement, le moteur Stockfish est amplement doté en points Elo, et peut se le permettre ! Le joueur peut consulter les évaluations de ces différents coups possibles sur l'ensemble de la partie en cours, ce qui permet une sorte d'analyse post-mortem. On voit également à quel niveau de qualité le Centaur a choisi ses propres coups en mode adaptatif, parmi les dix calculés par Stockfish. Car c'est ainsi que fonctionne l'adaptation : plus vos coups sont dans le haut du panier, plus le Centaur choisira parmi les coups forts ; et réciproquement plus vos coups sont faibles et plus il choisira parmi les coups inférieurs. C'est plus subtil qu'une adaptation coup pour coup, le Centaur se base probablement sur l'observation d'un nombre glissant de coups ; suffisament nombreux pour être représentatifs du niveau de son adversaire, mais pas trop pour être en mesure de s'adapter suffisament rapidement. Un autre volet d'adaptation a été cité par certains experts : le Centaur conserve un historique des parties jouées (que l'utilisateur ne peut pas accéder) et choisirait ses ouvertures en conséquence, notamment pour assurer la variété de jeu.
Sa technologie est elle-aussi bien différente de celle des autres échiquiers électroniques : sous chaque case il y a une antenne délivrant un signal modulé par la présence d'un matériau conducteur sur la case ; le dessous des pièces est équipé d'un adhésif conducteur. Il est ainsi possible de remplacer les pièces d'origine par d'autres, pour peu qu'on y colle une surface métallique, par exemple un disque découpé d'une feuille d'aluminium. Un autre élément technologique intéressant est l'affichage des cases, qui au lieu de s'appuyer sur une ou plusieurs LEDs en surface, utilise une LED sous le centre de chaque case, dont la lumière est diffusée par transparence sous forme de cercle autour des pièces, grâce à une coupole translucide parfaitement visible sous l'échiquier. C'est non seulement beau et original, mais aussi très ergonomique : ça attire l'oeil instantanément et ne laisse place à aucune ambigüité (je pense par exemple au déplacement du Cavalier : avec un affichage à quatre diodes par cases, la case intermédiaire voit trois de ses quatre diodes s'allumer, alors qu'elle n'intervient pas dans le déplacement). Concernant la CPU, il s'agit d'un nano-ordinateur complet, en l'occurrence un Raspberry Pi Zero (512Mo RAM, horloge à 1Ghz, processeur 32 bits mono-coeur ARM11), dont seul le port micro-USB d'alimentation électrique est laissé accessible.
Enfin, le design : très moderne, j'aime les tons doux de l'échiquier contrastant avec le noir et blanc des pièces plastiques au toucher agréable ; l'échiquier est très fin et très léger, mais parfaitement rigide (la structure de coupoles sous l'échiquer semble bien y contribuer). L'afficheur à encre électronique est petit (et donc discret) mais reste très lisible, même en mode d'affichage à petits caractères.
Sorti sur le marché la même année que le King Performance, et au même tarif initial, la comparaison des deux offres a généré des débats passionnés, souvent à l'excès. Sur l'inventaire des fonctionnalités, le King Performance est largement devant, et c'est bien normal : il participe d'une longue évolution de l'échiquier électronique traditionnel, avec plus de puissance, plus d'options, plus de niveaux, plus de connectivité ; alors que le Centaur est totalement en rupture avec cette lignée et vise d'autres usages, et d'autres usagers. En fait, il ne faut simplement pas essayer de les comparer, ils ont si peu en commun ! Par contre, je n'étais personnellement pas prêt à mettre le même prix pour le Centaur, et j'ai donc attendu trois ans pour une belle opportunité : un Centaur neuf, complet, sous garantie avec sa facture de 390€ datée d'une semaine (le King Performance aussi a vu son prix augmenter aux environs de 400€), revendu 220€ par la personne qui l'avait reçu en cadeau.
Concernant le niveau de jeu : le niveau Elo indiqué ci-dessus est celui du mode Expert, sans contrainte d'horloge (donc à environ 10 secondes par coup),  jouant face à des programmes PC de niveau équivalent réglés sur 40 coups par 10 minutes (15s/coup en moyenne). Pour les deux niveaux adaptatifs, j'ai publié ici (désolé, c'est en Anglais) une petite étude sur 48 parties, dont je résume les principales conclusions :
- le mode Amical a joué légèrement plus faible que l'opposition, marquant 25% des points
- le mode Difficile a joué légèrement plus fort que l'opposition, marquant 73% des points
- au global sur les deux modes, le Centaur a marqué 49% des points.
En première lecture, cela semble parfaitement équilibré et le contrat rempli !
Cependant, si on zoome par catégorie de joueurs, on s'aperçoit qu'un débutant ou un joueur occasionnel (1000-1300 Elo) devra bien se concentrer même face au mode Amical, qui a marqué 75% de points dans cette catégorie (pas si amical que ça, donc !) ; et le mode Difficile sera hors de portée. A l'inverse, un fort joueur de club (1850-2050 Elo) trouvera le mode Difficile un peu trop gentil avec seulement 38% de points marqués par le Centaur, et le mode Amical sera sans intérêt. Enfin, pour un joueur de club moyen (1450-1750 Elo), le mode Difficile offrira un vrai challenge, avec 81% des points pour le Centaur lors de mon test, et le mode Amical lui permettra à l'inverse de gagner systématiquement pour peu qu'il reste concentré.


catégorie précédente : machines de niveau bon joueur de club, deuxième catégorie
retour à "mes ordinateurs d'échecs"